- november 6th 1992
Cher journal,
J'ai encore la sensation du sable humide sous mes pieds. Je dansais entre les galets, avec une seule chose en tête : revoir ma mère.
Je fais ce cauchemar, depuis toujours, encore et encore. Elle est attirée inexorablement dans les profondeurs. L'eau pénètre dans ses poumons.
Mais cette fois, ce n'était pas ma mère. C'était lui. L'amour de ma vie, englouti dans les abysses. Le lendemain, j'ai appris qu'il avait disparu. Est-ce de cette façon que ma mère est morte ? Est-il mort lui aussi ? Je ne peux pas y croire. Je ne veux pas y croire.
Ma grand-mère maternelle m'a recueilli quand j'avais quatre ans. Elle m'a élevé comme sa propre fille. Je vois les photos encadrées dans l'escalier. Ma mère me ressemblait tellement. Ma grand-mère sait toujours quoi me dire quand ça ne va pas. Cette fois encore, elle avait réponse à tout. "Ta mère, plus que tout autre, savait comment traiter avec les ondins. Il existe un moyen de communiquer avec elle. C'est bientôt Samhain, quand le voile entre les vivants et les morts est plus fin que jamais. C'est à ce moment que tu devras faire ton rituel".
Tout ça est nouveau pour moi. Je n'étais pas sûr d'y parvenir. Mais l'air était chargé ce jour là. C'était comme si le vent me guidait.
De l'écume s'est formé une forme humaine. Elle s'est avancé vers moi. J'ai ajouté le sel de mes larmes à l'océan. Elle m'a parlé d'une voix si douce, si apaisée. Et puis elle est repartie comme elle est venue, me laissant encore plus désemparée.
Une phrase me revient, comme un murmure lointain : "Le monde est fait de nuances."